Ou comment se mettre à dos les pro et anti… Toujours est-il que le chemin dans cette direction semble plutôt broussailleux depuis chez moi !
Oui, le titre est provocateur… car dans cette interrogation se retrouvent des postures de principe et l’allusion à des discussions passionnées entre pro- et anti-. Plus largement, c’est autour de la philosophie d’approche de la composition / programmation et de l’improvisation que peut se situer ce débat. Et moi, qu’est-ce que j’en pense après avoir testé ? Est-ce que ce type d’outils pourrait m’aider et s’intégrer dans ma démarche ?
Rappelons déjà que Max/MSP de Cycling74 ou ses pendants gratuits (PureData, le feu jmax) découle d’un programme destiné au départ à l’analyse du signal et au calcul mathématique. La musique étant un signal audio, ça ne semble pas idiot. Les effets étant des opérations mathématiques, là aussi ça semble plutôt pertinent. L’idée de base est de créer un projet musical de A à Z en choisissant, agençant et programmant les briques dont on a besoin. Ceci veut dire que pour créer un son, on utilise par exemple un oscillateur pour générer un signal, un ‘câble virtuel’ pour amener ce son dans une boite dans laquelle va être appliquée une fonction mathématique, avant d’alimenter par un autre « câble » la sortie audio de la carte son. Ce principe autorise une liberté totale puisque l’on peut faire interagir n’importe quel élément (capteur de mouvement, prise de son, iphone, wii…) avec n’importe quel traitement sonore ou logique (choix d’un son ou d’un autre, pilotage d’un effet ou d’un appareil externe en fonction de la prise de son…).
Une illustration visuelle ici (merci Judikaël pour le lien) :
Dans la théorie, c’est pas mal tout ça, et moi qui cherche à interagir avec mon ordinateur devrait être comblé ! Oui mais, pour construire quelque chose d’intéressant musicalement, il faut déjà :
– être capable d’utiliser les briques élémentaires (demande un peu d’acharnement, mais quand même accessible)
– imaginer le paramétrage global qui permettra :
- d’obtenir des sonorités intéressantes
- d’avoir une progression sonore riche et cohérente
Et là, pour ces deux points, j’ai pour ma part de grosses difficultés avec ces logiciels ! Et je ne pense pas être le seul.. Si vous prenez le temps de regarder un peu les vidéos postées par les utilisateurs, vous risquez d’être impressionnés par la variété des concepts utilisés :
Par contre, pour obtenir des sons variés et d’une certaine complexité en maîtrisant leur évolution, il faut une maîtrise importante. Il semble en effet très facile de retomber dans des sonorités « 100% informatiques » qui du coup ne seront pas aussi originales qu’elles prétendaient l’être.
L’approche avec ce type de logiciel présente pour moi un handicap important : un projet de type Max/MSP commence par une abstraction poussée qui est peu compatible de projections, intuitions sonores initiales. De mon côté, je construis mes compositions en assemblant des sonorités dans la recherche d’une intégration de sonorités intéressantes en lien avec une construction harmonique. Le choix d’un concept sous Max/Msp restreindrait mon champs d’expérimentation à certains éléments sonores ou effets, au détriment des équilibres naturels de sonorités et d’harmonies, (à moins de passer énormément de temps en expérimentations).
Je préfère donc pour ma part partir d’outils moins ouverts (utilisation d’instruments virtuels ou d’effets réalisés par des tiers), quitte à les détourner de leur fonction initiale. Mes idées peuvent résulter du test de tel ou tel pré-réglage, que je vais ensuite adapter en fonction de mes attentes. Cela m’autorise plus d’intuition tout en repoussant mes recherches sur des frontières maîtrisées.
Avec Max/MSP, à trop chercher la liberté dans l’outil, j’ai le sentiment que l’on ne choisit pas réellement les limites sonores sur lesquelles on souhaite travailler, celle-ci apparaissant au fur et à mesure de la programmation du concept. Le choix d’outils plus modestes et pré-programmés permet au contraire de choisir la liberté que l’on va laisser à telle ou telle dimension sonore.
On peut noter par ailleurs que mon approche n’est pas unique. En effet, les difficultés d’appréhension de l’outil font que les derniers développements de Max/MSP vont vers plus d’ergonomie et d’intégration. A travers la proposition de modules préprogrammés et l’interfaçage avec d’autres logiciels, Max/MSP s’oriente vers plus de facilité pour le compositeur. En plus d’une intégration possible dans des produits plus aboutis comme Ableton Live, l’utilisation final peut s’appuyer de plus en plus sur des patchs et plugins divers, rendant des étapes de conception du son plus intuitives et rapides. La conséquence de l’utilisation de briques pré-programmées est par contre que cela revient à brider ou influencer la démarche initiale, limitant forcément la totale liberté initialement souhaitée.
Si cette tendance se confirme, cela voudra dire que je pourrais de nouveau essayer d’utiliser ce produit, mais avec ma philosophie actuelle de composition ! Rien n’est définitif…